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Dialogue chasseurs/randonneurs : l’absence remarquée des fédérations de chasse

Invités de la table ronde, de gauche à droite : Antoine Berton (Le Chasseur français), Catherine Courade (FFCAM Rhône-Alpes), Jean-Yeves Bouvet (ONF Isère), Pierre Athanaze (Action nature rewilding) et Frédi Meignan (Mountain Wilderness) © Jean-Christophe Peres

  Vous êtes un ovni », a dit Frédi Meignan, le Président de l’association Mountain Wilderness à Antoine Berton, rédacteur en chef de la revue Le Chasseur français. M. Berton voulait rassurer le public, majoritairement randonneur, sur la bonne conduite des chasseurs. « Si je croise un randonneur lors d’une sortie de chasse, je ‘casse’ ma carabine, j’en extraie les munitions, je le salue, lui souris et discute avec lui ». Ce qui a fait bondir une bonne partie de l’assemblée n’ayant pas vécu cette expérience sur le terrain.

A commencer par Frédi Meignan qui a déploré les mauvaises pratiques dont il est témoin à Freydières, dans le massif de Belledonne, où il cogère un café concert a proximité duquel un jeune randonneur de 20 ans a été tué par un chasseur le 10 octobre 2015, alors qu’il se promenait sur une piste carrossable. Il résumait ainsi l’équation : « On a pas le choix, on doit trouver des solutions. Notre société est malade du stress et se ressourcer dans la nature sans craindre une balle de chasseur est un besoin vital pour des millions de personnes ».

Des solutions pour un meilleur partage des espaces, il en existe, et la soirée a permis d’évoquer un certain nombre de pistes. Le dimanche sans chasse ? L’interdiction de chasser dans des secteurs à forte fréquentation ? Pour le père du trailer tué le 5 décembre dernier par un chasseur au Semnoz et présent dans la salle, il faut jouer sur ces deux paramètres, estimant « criminel » de faire cohabiter des gens en baskets et des gens munis d’un fusil.
La nécessité d’un apprentissage plus poussé du tir a été évoquée, insuffisant de l’avis même d’Antoine Berton. Par exemple pour mieux maîtriser ses émotions en ne tirant pas sur une cible non identifiée, infraction à l’origine de nombreux accidents mortels, dont ceux de Belledonne et des Bauges. Catherine Courade, présidente du Comité régional Rhône-Alpes de la Fédération française des clubs alpins et de montagne (FFCAM), s’est étonnée du décalage entre le niveau de formation des chasseurs et celui, « très exigeant », des encadrants professionnels ou fédéraux pour les activités de montagne. Il n'existe pas non plus de recyclage obligatoire pour les personnes en possession d'un permis de chasser.

« Les chasseurs ne sont soumis à aucun contrôle médical ou contrôle d’alcoolémie, c’est scandaleux », a ajouté Pierre Athanaze, le président d’Action nature rewilding. Autre préoccupation : le manque d’information à la disposition du grand public, notamment sur les secteurs où se trouvent des chasseurs, pour adapter sa sortie. Pourquoi pas une cartographie des zones chassées ? « L’organisation actuelle de la chasse ne le permet pas », répond Antoine Berton pointant la complexité du système cynégétique, y compris pour les chasseurs. Autant dire que pour le reste de la population, c’est à n’y rien comprendre. Pas étonnant que la chasse soit « mal comprise », comme le regrette Jean-Yves Bouvet, directeur de l’Office national des forêts en Isère, qui reconnaît que les instances représentatives des chasseurs doivent travailler sur cette question. Lui prône le dialogue entre le monde des chasseurs et celui des randonneurs.

Encore faut-il pour dialoguer que les représentants officiels des chasseurs en aient l'envie. Ce qui reste à démontrer. Mercredi soir, la Fédération départementale des chasseurs de l’Isère et la Fédération régionale des chasseurs de Rhône-Alpes ont brillé par leur absence, ayant refusé notre invitation à débattre publiquement. Sans doute estiment-elles plus intéressant de s’en tenir aux négociations avec le monde politique où leur poids est inversement proportionnel à la représentativité des chasseurs dans la population française. Ou comment 1,6 % de la population dispose d’un groupe de pression de 84 sénateurs (le plus important des "groupes d'études" du Sénat) pour défendre ses intérêts. Ce dont la Fédération nationale des chasseurs s’est vanté dans un communiqué du 27 janvier 2016, annonçant que « le monde de la chasse se réjouit que tous les amendements anti chasse disparaissent de ce texte (ndlr : la Loi biodiversité) grâce à la mobilisation efficace des sénateurs, à l’initiative du président du Groupe chasse et pêche du Sénat, Jean-Noël Cardoux, avec (…) le soutien de la ministre ».

En Isère, la Fédération départementale des chasseurs a été invitée par le Préfet à se joindre à un groupe de travail chargé de plancher sur la question du partage des espaces. La FFCAM, dont les deux randonneurs tués cet automne étaient adhérents, n’a pas été jugée suffisamment représentative pour y être acceptée. Les randonneurs y sont représentés par le Comité départemental de la randonnée pédestre en Isère (CDRP 38), dont les positions sur la chasse semblent pour le moins timides, à l’instar de la Fédération française de la randonnée (FFR) qu’il représente, et qui n'a pas réagi publiquement au décès des deux randonneurs. La Frapna Isère fait aussi partie de ce groupe de travail, sur lequel la Préfecture ne souhaite pas communiquer.

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