«Ce jour-là mon mari n’a pas été victime d’un accident, il a été tué. Ce jour-là, ce sont des assassins que nous avons croisés, la chasse n’est pas un jeu. Mon mari mesurait 1,82, pesait 83 kg, il n’avait rien d’un sanglier. Il était beau, il avait deux petites filles, nous étions heureux…» C’est par ce message poignant posté sur les réseaux sociaux que Mélanie a exprimé sa peine et son incompréhension face au drame survenu le 5 décembre, à Quintal (Haute-Savoie), dans le Semnoz, massif surplombant Annecy. De quoi inquiéter les randonneurs, notamment genevois, nombreux à arpenter les sentiers de France voisine.
Ce samedi matin-là, Mélanie et son mari Gaël, âgé de 43 ans, randonnent au Semnoz. Il est environ 10 h 30 lorsqu’un coup de feu retentit. Atteint d’une balle à la tête, le quadragénaire s’effondre. Malgré les efforts des secours, il ne se relèvera pas. Selon les premiers éléments de l’enquête, un chasseur d’une vingtaine d’années serait l’auteur du tir mortel.
Dans un communiqué, la Fédération des chasseurs de Haute-Savoie a «exprimé toute sa compassion et son soutien» à la famille du défunt. Elle rappelle que «la sécurité est depuis longtemps sa priorité» et qu’ont été mis en place «une réglementation rigoureuse, une formation théorique et pratique des chasseurs».
Forcément insuffisant aux yeux des proches de la victime. Le drame a logiquement suscité de vives réactions dans les milieux sportifs et plus largement dans l’opinion publique française. Samedi 26 décembre, ils étaient une centaine devant la préfecture de Haute-Savoie, à Annecy, pour rendre hommage au joggeur.
Parmi eux, Georges Depetri, membre du Club alpin français d’Annecy souligne: «Il est mortel de se promener dans le Semnoz. On ne peut plus le fréquenter. Il faut que cela change. Il faudra qu’un jour le week-end soit réservé aux promeneurs et aux sportifs. Que ce ne soit plus quelques chasseurs finalement très peu nombreux qui accaparent la nature sous des prétextes qui ne sont plus de notre siècle.»
Un avis que partage l’Association pour la protection des animaux sauvages (ASPAS). Cette dernière poursuit la récolte de signatures pour une pétition visant à interdire la chasse le dimanche en France. «Les chasseurs représentent moins de 2% de la population (lire ci-dessous), mais ils s’approprient la nature tous les jours de la semaine pendant neuf mois de l’année, au détriment des 98% restants», précise le texte. L’association assure que plus de 300 000 citoyens ont déjà apporté leur soutien à cette démarche, qui a connu un nouvel élan suite au drame de Quintal.
Créé il y a un an, le collectif «Pour le dimanche sans chasse» a lui aussi connu un regain d’activités en cette fin d’année. Selon son président, Etienne Spataro, ce sont désormais 610 organismes (associations, clubs, etc.) qui sont adhérents. «A Genève la chasse est interdite depuis 1974, rappelle-t-il. Nous ne nous prononçons pas contre le principe de la chasse mais demandons seulement un jour sans chasse. Et ce, pour un partage équitable de la nature.»
(TDG)
(Créé: 29.12.2015, 20h14)