Ce lundi soir, lors du conseil municipal d'Alès, l'avenir de l'abattoir s'est emparé des débats. En réponse aux interrogations de l'opposition, le maire Max Roustan a annoncé craindre une fermeture rapide de la structure employant 28 personnes. Une inquiétude partagée par les éleveurs.
L'abattoir d'Alès n'a pas fini de faire couler de l'encre. Après la vidéo diffusée par l'association de lutte contre la consommation de produits animaux L214 en octobre dernier, le maire a ordonné sa fermeture. Début décembre, la réouverture a été actée avec des contrôles renforcés pour en faire un "abattoir exemplaire", qui fait vivre toute une filière de proximité.
Mais la problématique est loin d'être réglée. Depuis, d'autres vidéos ont circulé (Le Vigan et Moléon-Licharre) et les contraintes se sont multipliées. A commencer par une cage-piège de 150 000 € dont la Direction Départementale de la Protection des Populations a ordonné le remplacement. Cette dernière accueillait les bovins halal et le taureau de Camargue avant l'affaire de la vidéo. En attendant, elle ne fonctionne plus et l'établissement n'accueille plus que les ovins, porcs, caprins et bovins en abattage traditionnel. Ce qui représente 30 % de tonnage en moins, selon Luc Hincelin, responsable de la commission élevage à la chambre d'agriculture du Gard et éleveur à Fons-sur-Lussan. "Il n'y a plus assez de boulot pour les employés. L'abattoir est désormais fermé le mercredi", assure-t-il.
Autre obstacle particulièrement sensible : le rituel halal. Il représente, selon la ville, 70 % de la viande commercialisée dans la capitale cévenole. Or, l'abattoir d'Alès ne parvient pas à respecter la réglementation selon laquelle l'animal doit être mort au bout de 90 secondes, pour les gros bovins. "On a été laxiste. Comme dans de nombreux abattoirs, sans étourdissement, la bête succombe après 3-4 minutes. Alès n'est pas la seule. Mais les autres ne sont pas épinglés et nos clients vont les voir", fustige Luc Hincelin. Le sous-préfet Olivier Delcayrou s'en défend : "Il faudra trouver un système conforme. Les consignes ont été renforcées partout en France. Ceux qui ne les respectent pas seront identifiés".
"L'abattoir est très malade"
De son côté, la ville, gestionnaire des lieux, a l'avenir de l'abattoir entre ses mains. Elle se dit lasse des mises aux normes incessantes et semble baisser les bras. "On nous demande toujours plus. En 2010, on a mis 2,5 millions sur la table. Aujourd'hui, on a perdu 300 000 € avec l'arrêt du cheval, et les réglementations ne cessent de se durcir. L'Etat veut même que l'on lave les bœufs ! On a déjà enregistré 2,5 millions d'€ de déficit. L'abattoir est très malade", confie le maire Max Roustan qui refuserait d'investir à nouveau tant qu'il n'a pas récupéré son carnet de commande. "Qu'on nous laisse reprendre le rituel sans contraintes, ça commence à bien faire!".
En coulisses, on avance déjà que l'abattoir d'Alès ne tiendra pas un an de plus dans ces conditions. D'autant que toutes les instances concernées se renvoient la balle. L'Etat se veut optimiste : "Beaucoup de choses ont été faites depuis la table ronde du 13 novembre qui a réunit l'ensemble des acteurs du secteur. Même s'il reste des marges d'amélioration. Une porte pour maintenir la tête des veaux et taureaux de Camargue devrait être installée prochainement, ça avance. Il faudra ensuite se mettre autour de la table pour réfléchir à la future gouvernance. J'ai lancé un audit financier, on devrait avoir les résultats dans quelques semaines". En la matière, plusieurs pistes ont été lancées, notamment la création d'une société d'économie mixte avec l'abattoir du Vigan, spécialisé dans le bio. Reste à se retrousser les manches.